10 avril 2007

Renvoi d'ascenceur

Après avoir bénéficié - comme ce fut déjà le cas en 2002 - du large et salvateur coup de pouce du président de l'U.M.P.1 dans sa course aux signatures, comment ne pas voir dans la sortie de J.M. Le Pen sur les origines hongroises de N. Sarkozy une sorte de renvoi d'ascenceur ?

N.S. droitise et radicalise son discours, franchit allègrement toutes sortes de lignes jaunes2 et prend visiblement plaisir à cueillir ses supporters "à froid" 3. Ce doit être sa façon de faire comprendre aux nouveaux venus qui est le chef et un moyen de tester la soumission du fraîchement rallié : "Prouve ton soutien et ta loyauté en ne mouftant pas !". C'est beau comme du St Rémi à Clovis : "Brûle ce que tu as adoré, adore ce que tu as brûlé". A ceci près qu'il n'y a pas grande fierté à se courber et se taire à tout prix.4

Mais revenons à nos moutons et à la baignoire dans laquelle on les égorge. En quoi la "charge" légère de J.M. Le Pen à l'encontre de N.S. peut-elle servir ce dernier ?
Tout simplement en l'humanisant : "La bête m'attaque ! C'est donc que je ne suis pas de sa trempe !". C'est - sensiblement et avec un vocabulaire différent - ce que claironnent les supporters de Monsieur "Génétiquement correct" depuis deux jours, comme pour gommer - une fois encore légèrement - les sorties de leur poulain.

N'oublions pas, cependant, que jamais N.S. ne s'est attaqué frontalement au Front National, qu'il n'a jamais affirmé qu'il n'y aurait pas d'alliance avec ce parti, contrairement à son mentor Jacques Chirac. Qu'il y a tout lieu de croire a contrario que certains y travaillent en sous-main. Ou en rêvent.

Comparées à la virulence des attaques lancées contre Ségolène Royal et François Bayrou, les échanges d'amabilités entre F.N. et U.M.P. ressemblent plus à une guerre en dentelles qu'à une guerre de tranchées. Les premières ne laissent aucune place à une réconciliation : on imagine mal F. Bayrou appeler à voter Sarko le soir du premier tour après tout ce que l'autre lui aura mis entre temps !

Dans le cas des seconds, les "adversaires" semblent prendre garde à ne pas franchir la ligne blanche, fait pourtant peu coutumier et proprement étonnant de la part du champion de la rupture ! La porte reste ainsi entr'ouverte pour d'éventuelles alliances au second tour et aux législatives à venir, que ce soient les prochaines (2007) ou les suivantes.

J.M. Le Pen livre peut-être sa dernière campagne électorale. Qui sait si sa fille - et héritière ? - ne livrera pas les suivantes... au sein d'une U.M.P. étendue à d'autres formations que l'U.D.F. qui, pour avoir refuser de se soumettre, n'aura d'autre choix que se démettre ? Là encore on voit mal l'U.M.P. appeler à voter U.D.F. pour faire barrage à la gauche, plutôt que rechercher le soutien du Front National dont les idées, après tout, sont maintenant bien implantées dans le discours UMPiste.

La guéguerre que se livrent à fleurets mouchetés F.N. et U.M.P. ressemble de plus en plus à un jeu de dupes et de Tartuffe.

1 Rappelons que cela ne choqua pas grand monde que le ministre de l'Intérieur qu'il était encore à cette époque, responsable de l'organisation des élections, prenne position, violant son devoir de neutralité et d'impartialité...
2 Immigration et identité nationale, pédophilie et suicide décrits comme des tares génétiques pour ne citer que les exemples les plus récents.
3 La polémique "Immigration vs Identité nationale" a été lancée le jour du ralliement de Simone Veil, celle du "camps des fraudeurs et des voleurs" lau moment du ralliement de J.L. Borloo, celle sur la pédophilie et le suicide intervient au moment où l'inénarrable B. "Nanard" Tapie se range sous la bannière (pas encore étoilée) de l'U.M.P..
4 Simone Veil a qualifié de "plus grave qu'une imprudence" le rapprochement "immigration / identité nationale". On ne l'a pas encore entendue sur la pédophilie et le suicide génétiquement programmés mais elle doit avoir beaucoup à dire sur des idées dont elle connait, plus et mieux que d'autres, à quelles extrèmités elles peuvent conduire.